Langues de bois

Chaque élection politique nous fait atteindre un sommet dans le registre et, nous venons avec les régionales, d’entendre de nouveaux exemples : phrases creuses, déclarations pompeuses, affirmations stéréotypées… Mais, si la langue de bois (les Allemands parlent de langue de béton et les Chinois de langue de plomb…) est une expression qui serait apparue pour désigner la rhétorique des communistes, elle n’est pas l’apanage des politiques ni de l’administration. D’après Gilles Guilleron qui vient d’écrire un ouvrage plein d’humour sur le sujet (1), nous la pratiquons tous, plus ou moins consciemment, que ce soit par incompétence, gêne à aborder un sujet ou tout simplement diplomatie… « Notre époque est hantée par le principe de précaution. Le domaine du langage est aussi touché par cette peur » souligne cet agrégé de lettres qui s’amuse à dénicher des perles dans tous les univers. À l’instar de ces sportifs interrogés après un match qui se réfugient dans des déclarations toutes faites du type: « Cette défaite est riche d’enseignements pour la suite ». Ou ces recruteurs déclarant à des candidats qu’ils sont très expérimentés… pour ne pas dire trop chers. Ou encore, lorsque porte-parole et responsable de com en entreprise émaillent leurs propos de mots jargon, mots à la mode ou mots savants leur conférant un air intelligent et de la contenance… Etonnamment, Gilles Guilleron constate l’émergence d’une nouvelle forme de langue de bois : le parler vrai. « Il s’agit d’employer des mots simples, populaires, voire crus pour suggérer une proximité (…). La forme a un peu bougé, mais le fond est toujours dur comme du bois ! » (2). C’est d’ailleurs une tendance qu’on remarque chez certains politiques – parfois hauts placés –, qui fait déjà beaucoup parler et qui pourrait devenir une nouvelle langue officielle !

(1) : Langue de bois, First Editions.
(2) : Le Parisien.